dimanche 28 novembre 2010

Y laisser sa peau ...


Je ne l’avais pas revu depuis l’accident. Dès notre arrivée à l’hôpital, on l’avait transporté dans une salle au fond du corridor. Il avait fallu faire vite et le stabiliser pour éviter que sa blessure ne s’aggrave. Les larmes aux yeux et le cœur serré par l’angoisse, j’avais décliné son identité et répondu à la préposée à l’accueil tant bien que mal, l’esprit embrouillé.

«Il devra être opéré. Immédiatement.», m’avait annoncé le docteur un instant ou un siècle plus tard.

Puis il avait été question d’autorisation, de risques postopératoires, de cicatrices importantes, de … je ne sais plus trop.

«Si vous le voulez, je vous téléphonerai après l’opération pour vous donner des nouvelles.», avait dit le médecin, compatissant.

Le lendemain, en poussant la porte du petit hôpital, j’avais senti mes jambes trembler. Une odeur de désinfectant m’était montée aux narines, me soulevant l’estomac que j’avais déjà au bord des lèvres.

Comment allait-il réagir en me voyant? Allait-il s’agiter? Allais-je flancher?

«Il ne sera pas beau à voir… nous avons dû lui faire de nombreux points de suture et installer un drain afin que le liquide s’écoule…», m’avait-on avertie.

Puis, on m’avait conduit à la salle où d’autres patients impatients récupéraient, certains en gémissant, d’autres silencieusement.

Mes yeux avaient rencontré les siens, tout au fond de la pièce tamisée… il m’attendait.



Mon Jules fut victime d’un étrange accident lundi dernier; il s’en fallut de peu qu’il lui soit fatal. Après avoir manqué à l’appel toute la journée, ne réapparaissant pas toutes les heures pour venir croquer quelques grains de moulée comme il le faisait d’habitude, je l’aperçus près de la porte qui donne sur le jardin. Une fois à l’intérieur, son comportement me parut insolite et malgré qu’il m’ait signifié qu’il voulait retourner dehors, je décidai de ne pas le laisser sortir.

C’est au moment où je voulus le prendre pour aller le porter dans «sa chambre» le temps que je m’occupe d’une cliente qui venait d’arriver et éviter ainsi qu’il ne se faufile à l’extérieur, que je vis qu’il avait un trou énorme et béant au ventre.

Opéré d’urgence, moins d’une heure plus tard, l’intervention se déroula bien et à la lumière de l’examen préopératoire, on m’assura qu’aucun organe n’avait été touché. La déchirure était à ce point importante et la peau tellement abimée, que le médecin n’eut d’autre choix que de découper tout le tour de la plaie. Lorsque vint le temps de recoudre le ventre de Jules, il dut tirer ce qui restait, effectuant involontairement un drapage très peu esthétique.

Le drain fut retiré samedi et les points le seront vendredi prochain. D’ici là, minet est au repos complet, doit porter un collier élisabéthain et subir le très désagréable moment, deux fois par jour, d’ingérer un antibiotique en comprimé jeté au fond de sa gorge. Pauvre, pauvre Jujules…

Quant à la clé des champs, mon chat n’est pas prêt d’être autorisé à la prendre. D’ici à ce qu’il soit entièrement guéri, j’aurais trop peur qu’il y laisse sa peau …

lundi 22 novembre 2010

Excès de confiance ...


«Combien ça coûte faire remplacer une fermeture Éclair? C’t’une vieille jaquette, mais j’me décide pas à la jeter!», m’avait demandé une nouvelle cliente au téléphone.

«Entre $10 et $12.», lui avais-je répondu.

Lorsqu’un peu plus tard la dame déposa un sac sur mon bureau, elle me dit d’un ton assuré :

«Ça va être plusse $10 que $12, j’ai fait la moitié de l’ouvrage, j’ai décousu l’ancien zip…»

Assaillie d’un doute, j’entrouvris le sac et en retirai le vêtement qu’elle m’avait apporté.

«Oh… Sapristi!», m’exclamais-je.
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«Vous avez l’air de trouver que j’ai pas fait du bon travail… J’ai pas l’affaire spéciale pour découdre, fait que j’ai pris une lame de rasoir.», ajouta-t-elle candidement.
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«Hum… Je vois ça… Il me faudra travailler pas mal plus fort pour camoufler les coupures…».
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«Bah!», rétorqua ma cliente avec conviction. «Vous allez pouvoir arranger ça, vous êtes couturière!»
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Hum...
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mardi 16 novembre 2010

Dans l'oreille d'un sourd ...


Lui : Allez-vous pouvoir r’coude l’élastique dans le bas du pantalon?

Moi : Je n’aurai pas à le découdre puisque je raccourcirai le pantalon par une découpe sur la jambe.

Elle : C’t’une bonne idée, ça!

Lui : Oui, mais allez-vous r’mettre l’élastique?

Elle : A vient d’dire qu’a l’aura pas besoin de l’découde…

Moi : Effectivement, en faisant une découpe sous le genou, au-dessus de la fermeture éclair, je n’aurai à toucher ni à l’élastique de l’ourlet, ni au zip…

Lui : Puis l’élastique, vous allez…

Elle : Eille toé! Veux-tu ben arrêter! A l’a dit qu’à l’aura pas à l’découde, pis c’est mon pantalon, pas le tien!


Dix minutes plus tard, la cliente a retiré son pantalon de ski trop long et vient rejoindre son compagnon qui l’attend près de mon bureau d’accueil.


Lui : Eille! Bonne nouvelle! A dit que tu vas pouvoir garder l’élastique dans l’bas du pantalon.

Elle : Ben, je l’savais depuis l’début, a l’avait dit tantôt!

Lui : Ouin, mais moé j’connais rien à ça, la couture…


La réalité dépasse parfois la fiction …

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vendredi 5 novembre 2010

Victime ...


Je sais, je récolte ce que j’ai semé. C’est vrai, j’ai couru après.

«Tu n’as que ce que tu mérites…», a ajouté une amie lorsqu’elle a su.

Je l’admets: ça devait arriver tôt ou tard, c’était inéluctable. Je parie que vous-même, avant la fin de ce billet, me soupçonnerez de l’avoir souhaité. Vous avez sans doute raison. N’empêche, depuis ce jour, j’en ai la tête qui tourne. Je néglige mes exercices, je bâcle le ménage et je dîne à la sauvette de peur de me faire surprendre. Plus d’une intention, aussi bonne soit-elle, s’est inclinée devant le monstre que j’ai laissé entrer chez moi.

D’accord, je n’ai peut-être pas toutes les raisons, mais au moins 5,584, d’être victime …

…de mon succès!
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Génial, non?
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