vendredi 10 juillet 2009

Voies d’extinction…


Ma famille le sait, mes amis l’ont constaté et plusieurs d’entre vous s’en doutent. J’aime toutes les bêtes; les petites et les grosses. Celles qui ont des poils, des plumes ou des écailles. Qu’elles aient des antennes, une trompe ou même des anneaux.

J’ai aussi un grand respect pour les arbres, les plantes et certaines «mauvaises herbes». J’adore la teinte et le parfum des pissenlits, je craque pour les fleurs du chardon et pour les si jolies épervières orangées. Vous ne serez sans doute pas surpris d’apprendre, qu’incapable de mettre fin aux souffrances de trois géraniums faméliques qui avaient l’air d’avoir séjourné chez Baladine, je les transplantai dans le potager pour qu’ils finissent leur vie en douceur.

Les pages de mes Contes de Fée regorgent d'anecdotes parfois ridicules, comme le sauvetage d’une minuscule mouche destinée à servir d’encas à une énorme araignée. Ou fantasques, comme la fois où, sur la route 108, je fis stopper ma voiture … et celles qui me suivaient, pour tenter de persuader une jeune marmotte de regagner le fossé, alors qu’un poids lourd se dirigeait vers nous.

Moi qui suis plutôt discrète, qui n’aime pas attirer l’attention et qui, pour reprendre l’expression de mon ancien patron, suis «posée», vous seriez étonnés de voir la transformation qui s’opère lorsque j’aperçois une bestiole en danger. Exit le flegme, la placidité et le calme. Je deviens exaltée, survoltée et un brin téméraire. Vous vous souvenez de Hulk? Hé bien, imaginez une version miniature, sans le teint vert, quoique… Laissez-moi vous raconter.

C’était l’été, il y a 3 ou 4 ans. Je venais de fermer la boutique et j’attendais au feu rouge, à l’intersection d’une artère achalandée. Au milieu de la chaussée, quelque chose attira mon regard. Une masse sombre se trouvait pratiquement sur la ligne blanche et les voitures devaient faire un écart pour ne pas rouler dessus. Je compris rapidement de quoi il s’agissait. Aussi, dès que la lumière passa au vert, je m’engageai sur la voie transversale et fis monter ma camionnette sur le trottoir. À peine le moteur coupé, je bondis de l’habitacle et courus au milieu de la rue. Arrivée près de la boule d’un gris foncé, je n’eus guère le temps de réfléchir car le feu passait au jaune et les voitures commençaient à avancer. Je me penchai et pris entre mes mains la chose tiède qui demeura immobile. Je revins sur mes pas, grimpai un talus en tentant de ne pas me prendre les pieds dans ma robe longue et je déposai le petit paquet de plumes dans l’herbe dense. C’était un pigeon. Comment s’était-il retrouvé dans cette fâcheuse position? A-t-il survécu? L’histoire ne le dit pas.

Outre quelques araignées, mouches, bourdons et escargots, je n’avais pas réalisé de réels sauvetages depuis octobre 2008. Mais ça n’allait pas durer…

Lundi dernier, alors que je répondais à un courriel de Grande Sœur, je vis par la fenêtre ce qui me sembla une feuille morte qui tourbillonnait sur l’asphalte, comme soufflée par le vent. Le vent? Quelque chose clochait. Les arbres étaient immobiles et la «feuille» ne cessait de décrire des cercles, se déplaçant d’un côté, puis de l’autre dans la voie de droite.

Le Hulk en moi se réveilla et je me précipitai dans la rue comme si j’avais le diable aux trousses. La feuille n’en était pas une, vous l’aurez deviné. C’était une toute petite bestiole affolée, et qui, visiblement, était aussi myope qu’une taupe. Elle tournait en rond, cherchant un repère qu’elle ne trouvait pas. Avec mes pieds, je tentai de la diriger vers le rebord de la rue, mais dès qu’elle se heurtait à mes chaussures, elle me contournait et continuait son manège. Je n’osais trop la prendre de crainte qu’elle n’ait peur et me morde. Mes nombreuses tentatives furent vaines et des voitures roulaient vers moi… enfin, vers nous qui étions au beau milieu de la chaussée! Alors, quitte à passer pour la Fée-lée du village, je levai les bras bien haut pour stopper le trafic, décidée à ne pas laisser ma petite amie se faire écrabouiller. Après de longues minutes et tout plein de véhicules qui devaient nous contourner, je me décidai à attraper la bestiole par sa courte queue. Malgré ses protestations et ses contorsions, je réussis à la transporter sur mon terrain. Doucement, je la déposai dans l’herbe longue, loin des dangers que représente la rue pour les petits campagnols perdus et qui ne voient pas plus loin que le bout de leurs moustaches.

Alors, si par une journée de chaud soleil ou après une forte pluie, vous croisez quelqu’un sur le trottoir qui, le regard rivé au sol, se penche soudainement pour ramasser ce qui semble être une brindille, ne cherchez pas plus loin. Ce sera probablement moi, ou quelqu’un avec un cœur aussi sensible, qui ne peut se résigner à abandonner à une mort certaine, lente et atroce, de pauvres lombrics égarés.

Si ça me répugne? Pas vraiment. Si j’ai peur? Mais non! En fait, le plus grand défi c’est de tenter de me souvenir que je ne dois pas me mettre les doigts dans la bouche ensuite… ou dans celle de quelqu’un d’autre (** *).


PS : Ce sera mon dernier billet avant mon déménagement. Mais promis, vous aurez droit à des photos. Parole de Hulk euh… de Fée!

2 commentaires:

Lise a dit…

Bon déménagement Fée! Et que le nouvel environnement soit propice à l'éclosion de nouveaux Contes de Fée, aussi captivants que celui-ci. J'avais l'impression de voir la scène et de participer à tous ces sauvetages.

Et je suis ravie de constater que je ne suis pas la seule personne au monde qui ramasse les vers de terre, après la pluie, afin de les remettre dans un milieu plus accueillant pour eux. C'est rassurant!

Et j'espère que la nouvelle maison n'est pas située trop près...d'une voie d'extinction.

:-)

Anonyme a dit…

Je t'aime ma chère Fée!!! Quelle belle histoire. Je partage ta passion pour les bêtes c'est certain, et les doigts dans la bouche... lol!!

Que ce déménagement soit magique... (Je sais... Je ne serai pas là pour transporter tes boîtes.. Mais je fais mon possible pour t'encourager...loll!!)