Pour avoir fait sa connaissance il y a de cela fort longtemps, je croyais savoir qui elle était. Pourtant, je ne connaissais qu’une petite partie de sa vie et, je m’en confesse, avec le temps mon esprit en avait gommé de grands pans. Il en est parfois ainsi lorsque nos chemins, après s’être croisés, se séparent pendant de longues années.
Avant qu’elle ne réapparaisse, j’avais oublié à quel point nous nous ressemblions. Comme elle, mon imagination est fertile ce qui, enfant, m’amena à construire mille et un châteaux sur la «montagne» qui séparait les terres d’oncle Ernest de celle de Ti-Pierre Beaupré. À imaginer, dans la talle d’aulnes qui poussait près de la source, des pays inconnus où poussaient d’étranges fruits ressemblant aux groseilles et aux gadelles. À suivre les sentiers tracés par nos vaches à travers les bois et, en débouchant sur une clairière, rêver d’y creuser un abri comme celui de mon héros, Robin des Bois.
Comme Anne, les arbres me fascinent, moi aussi. Tout au long de mon enfance et de mon adolescence, malgré le même itinéraire emprunté par l’autobus scolaire jour après jour, je ne me lassais pas d’admirer l’abord des routes où poussaient de squelettiques épinettes, des bouleaux immaculés et des trembles qui, au moindre prétexte, agitaient leurs petites feuilles rondes. Les yeux rivés à la fenêtre, je préférais mes rêveries aux babillages de mes compagnons de banc.
Si Anne était romantique, je l’étais tout autant et, la nuit venue avant de m’endormir, j’inventais de délicieuses histoires dont j’étais l’héroïne. En posant ma tête sur l’oreiller, j’étalais mes cheveux de chaque côté de mon visage puis je croisais les mains sur ma poitrine et souriais gracieusement. Ainsi, je croyais que si un prince charmant venait qu’à passer, il me trouverait tellement jolie qu’il m’embrasserait avant de m’emporter vers son royaume, sur son cheval blanc…
Fillettes, nous aurions pu passer pour des sœurs : les mêmes taches de son sur le nez, les mêmes grands yeux verts et, si nous avions toutes deux une longue chevelure bouclée, la mienne était châtain foncé tandis que la sienne était rousse. Pourtant, à cette époque j’aurais bien aimé avoir les cheveux roux et si la nature m’en avait doté, comme Anne, je n’aurais pas toléré qu’on m’appelle Poils-de-carotte.
J’avais oublié la plupart de ces ressemblances et c’est à la radio que, récemment, j’entendis parler du retour d’Anne. Cent ans après la naissance de celle qui fit la joie de millions de lecteurs, je pus apprendre ce qu’avait été sa vie d’avant. D’avant celle où elle fut adoptée par Marilla et Matthew. Cette histoire, c’est le roman « Anne… Avant la maison aux pignons verts." Ce furent 599 pages de pur émerveillement, d’émotions, de larmes plein les yeux et de rires joyeux que nous avons partagés, Anne et moi…
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3 commentaires:
Bonjour Fée conteuse,
ce n'est que dans la vingtaine que j'ai découvert Anne; les films à la télé et les livres. Je suis retombée en enfance dans cet univers. Ce dernier titre (Anne...Avant la maison...), je ne l'ai pas lu mais j'ai l'impression qu'il doit ressembler davantage à son auteur, Lucy Maud M. qui n'avait pas du tout le tempérament serein que j'imaginais, pour dire le moins.
Je crois que tous les enfants ont un modèle; et dans ton cas, la ressemblance me semble tout à fait juste. En lisant ce que tu écris, on voit bien que tu as gardé cette faculté d'émerveillement propre à l'enfance, nullement altérée par les années. Enfin c'est mon opinion, et c'est un don précieux!
Mon héroĩne étalt Fifi Brindacier, et si je lui ressemblais physiquement (maigrichonne, oeil gris-bleu délavé, cheveux incoiffables), je n'avais hélas
absolument rien de son audace!
Bonne journée Fée, merci pour le sourire!
Anonyme Lise.
Fée,
après vérification, Lucy Maud M. n'est pas, contrairement à ce que je croyais l'auteur de Anne...Avant... J'étais pourtant certaine qu'il s'agissait d'un manuscrit posthume trouvé par hasard (pourquoi pas dans une vieille malle, au fond d'un grenier poussiéreux plein de toiles d'araignées... :)), et remanié par un autre auteur avant publication.
Dommage! J'ai dû confondre avec un autre livre. Mille excuses Fée...
J'ai aussi connu Fifi Brindacier mais de tous les personnages de mon enfance et du début de mon adolescence, celle à qui j'aurais voulu ressembler le plus, c'était Claude dans le Club des 5.
Quant à Anne, Avant la maison aux pignons verts de Budge Wilson, je vous le recommande "gros comme ça". C'est sublimement écrit et très touchant (ayez une boite de papiers mouchoirs pas trop loin).
:O)
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