Malgré que je séjourne à Saint-Pierre depuis douze jours, je fonctionne encore à l’heure de North Hatley, 120 minutes plus tôt.
Si le soir, sur l’archipel, je me mets au lit vers 23h30, dans mon village québécois il n’est que 21h30, heure à laquelle habituellement je termine mon souper. Évidemment, c’est un peu comme si je me mettais au lit très tôt, ce qui permet à la bête, de reprendre du poil (au sens figuré, bien entendu). Mais le matin, impossible de sortir des bras de Morphée avant 10h00, heure de Saint-Pierre, ce qui équivaut, sur mon vieux réveille-matin québécois, à 8h00 seulement. Et comme chez-moi j’ai l’habitude, chaque matin, d’ouvrir les yeux vers 7h30 mais de rester sous la couette jusqu’à la fin du bulletin de nouvelles de Radio-Canada vers 8h10, ça demeure relativement raisonnable. Sans être une lève-tard, je suis loin d’être une lève-tôt. Mais lorsqu’à Saint-Pierre, je n’émerge du sommeil que vers 10h00, ça me déprime un peu.
Il faut dire que la chambre dans laquelle je dors est très obscure; les toiles opaques des fenêtres plongent la pièce dans la pénombre. La mienne au Québec, à l’opposé, n’a que des rideaux blancs qui laissent le jour entrer, permettant au soleil de faire son boulot et de me réveiller tout doucement.
Depuis mon arrivée sur l’île, je n'ai réussi qu'un seul matin à me lever à 7h30, heure locale. Tous les autres, ce fut vers 10h00 et parfois plus tard. Horreur! Le temps de m’habiller, de me faire un thé et de me préparer un copieux petit déjeuner, l’horloge indique 11h00. Puis celui de le déguster en dévorant quelques chapitres d’un bouquin, les aiguilles filent jusqu’à 11h45. Comme à Saint-Pierre tous les commerces et les écoles ferment sur l’heure du dîner, cela signifie qu’au moment où je suis à faire disparaître les traces de mon petit-déjeuner gargantuesque, mon ami et sa progéniture arrivent, affamés. Et moi, je me sens un peu décalée.
Évidemment, je n’ai pas faim pour dîner. Mais trois heures plus tard, si. Je sais que je pourrais bien attendre à 16h00, heure de la traditionnelle collation saint-pierraise. Mais comme souvent celle-ci est composée de pâtisseries ou de pain blanc et de fromage, ce qui n’est pas tout à fait ma tasse de thé, je profite que la maison soit déserte à 15h00, pour me faire griller deux ou trois tranches de pain blanc mais néanmoins croûté ou encore pour m’empiffrer de pâtes que je recouvre généreusement de sauce à spaghetti. Ainsi, lorsque les enfants arrivent de l’école et qu’ils collationnent, ma fringale est du passé. Ce n’est qu’à l’heure du souper, vers 20h00, que mon appétit se met au diapason de la maisonnée. Cependant, comme ce repas est moins copieux vu son heure tardive, enfin, moins que celui que j’ai l’habitude de me préparer chez-moi… il m’arrive, vers 23h00 de ressentir un petit creux.
Il est probable que j’arriverais, à la longue, à me mettre à l’heure et à table en même temps que l’archipel. Mais je ne crois pas que je ferais miennes les habitudes sucrées de sa population. Moi qui, enfant, préférais le sel sur les tiges de rhubarbe fraîchement cueillies ou qui, en cachette, buvait le vinaigre des pots de « dills pickles », ai d’avantage le profil de la dent salée…
Néanmoins, toutes ces différences, si petites soient-elles, me semblent exotiques. Font que je me sente en vacances, dans un pays différent, ailleurs. Ainsi, lorsque je retournerai au Québec, dans ma petite maison rouge, j’en aurai pour quelques jours à reprendre mes habitudes et à me souvenir qu’à Saint-Pierre je faisais autrement… deux heures plus tard.
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